Les autres –

Ce travail explore l’identité des patients du centre psychiatrique D. à travers une photographie psychologique du geste.

Le geste objectif est inévitablement interprété et choisis. Il amène donc à une conclusion subjective de son analyse.

C’est pourquoi j’insiste sur une idée de rencontre partielle avec soi-même et non pas uniquement avec les autres.

La communication non-verbale a été rendue compte comme une matière riche et quasi infinie.

Le choix de la liberté comme traitement par le centre D. amène à ses patients une forme d’émancipation par l’expression.

La souffrance intérieure est toujours dérangeante aujourd’hui.

Je suis ce que je photographie.

 

 

 

samedi 10 juin 2017
Livre 1 de P2. « Le trésor d’un pirate perdu » non corrigé.

le trésore dun pirate pairdu
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sete istoire se pase en 1680 unpirate qui set aichoues sur une petite ile et il
et pui il mes des piége tous outoure de sa cachéte pour que pairsone pouise le voles et voila que en 1990 un petit croupe arive sure lile et comanse a fouies pour trouves se fameu trésore mai il ne trouve que des
ose et rin doutre et un corte pour se fait prenre dans un de set piége et le
réste du croupe arive pour sortire le copin du piége et la il se tise que il na rin
apare que des piége et pas de trésore mes le petit croupe ne se daicourge pas il finirons pas le trouves e faeu butin et li se couche a 21 h et le landenin
il feuron doutre rechairge et apres 6 ans il mon rin trouves il déside de partire et un jour une petite enbarcemen sé choue sure lile et abore il a un anfents de 10 ans et il est seule et il sedi que il va nourire mes la réson lanporte sure la more et voila que sa fait 3 joure que il est seule sure lile et il comansen par
chairches de coi se nourire et il trouve des banane et des noi de coco et il a drouvre une crote pour la nui et il a fait du feux et le 5 jours il fait le toure de lile sen savoire se que il poura bein trouves mes un jour que il chairches de coi se nourire il fait la découverte dans une crote une dorche et une bousole que il naves japes vu et il comanse avoire se que la bousole indique et pui il la mai danns sa poche et il continue a voire se que il a dans sete croe et la il découvre un pistoles et une épaie qui venes dune outre époque et il se di que il a en fin decoi coupes des brenche et du bois pour se choufes et des brenches pour faire un toi et il a de quoi se nourire mes pas de coi boire mes.

chapite 2 .
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ET il chérche de coi boireet apres unedemieur il fini par trouves de coi boire
et il retourne a son cenpman pour lamui et il ait un feux pour se choufes la nui et le lendemin il se déside de faire le doure de lile pour voire se qui a sue
sete ille et il fait une trouvaie set adir que il trouve un casque de la deusiéme gaire mondiale et il se di que il drouvera outrechause et en aifes il trouve une
baonaite et il se i que ç,est son trésoe a lui et voila que il a 11 ans minteman
et dougoure pa de navire a lorison et il se di que il va paset sa vie sure lile et
que au cun navire ne pasera et pourtan sure lile il a un traisore d,un pirate mai il ne l pas trouves et il trouve un aniéne base militére japones et ilentre dans sete base et la il fait la découvérte dun drapou chinoi et un cofre qui condenes une boite de maidicamen et une paire de gumaile et des vaiteman et 3 paire de chausure et une carte de lile et puiil senfonse den la base et la il voi un fusi et des cartouche et il raméne le tou dans la crote et pui il retourne ou fore et la il voi des oseman de solda et pui il retourne a la crote et la il recarde se que il a ramenes du fore pui retourne dans le bois et il trouve une petite maison et il entre et il découvre des livre et un miroireb et de coi se raset et il se di que il a de la chanse et pui il re dourne a la crote et la il se di que il est le roi de lile et un jour une barque en caouchou arive sure
lile et de dans il a une fielle de 12 ans et elle débarque sur lile et elle fait la conaisense du garçon et il li di de venire dans la crote et pres du feux pour qu,elle se réchoufe care elle est toute mouies de la téte et il apeur que elle atrape une plaimonie et les voila dous les deux dans la crote et la fielle elle luiti que sure sete ille il a un traisor dun pirate et on ne set pas ou il est cacheset il on bein lintension de le trouves en senble et les voila sure la trase du trésore du pirate mes il ne trouve rin et il se demande si il est sure lile et pourten il a des arme de piraye sure lile .

CHAPITRE 3 .
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ET pourtent il on bein lintension de le trouves se fameu trésore mes pour le momen il pense a survivre dous les deux et sur lile le ten passe bein len temen et il on decoi menges et decoi boir
set se que il pense mes 3 joures plutare la nouriture se fait rare et il son obluiger de trouver de coi se nourire et de cou boire et les voila a la rechéche de nouriture et apres 7 jours une barque arive sur lile et de dans il a 3 anfents de 14 ans et les voila apésen a 9sur lile et il a pas aset de
nouriture pour tous et il son bein obliges de hérches de coi nourire dous se petit monde et il chérche de cou se nourire et de coi boire set se que il est le plu inporten pour le momen pour
nourire tous se monde mes jour plutar 2 des anfents meure care il na plurin a menger sure lilie
mes dans leur maleur la maire leur pouse 5 male et les anfents déside de les ramenes sur lile et
il ouvre les male et la se que il découvre set de la nouriture et de coi boire et il déside de maitre doute la nouriture a la bri et un jour une outre male arive et il a de den des vatemans et des arme et il de sise que les male doive vnire un navire mes le qu,elle et dou et il se demande si il noura pas doutre qui viénera sure ille et sa fait un peu peure et il réste que que 5 anfents mintenan et il dise que set aset et un jour la maire ramaine 9 male et les anfents les ramaine les male a leur cenpemans et la il ouvre les 9 male et il découvre dans les males de la nouriture et des paile et 3 anfents déside de faire le toure pour savoire dous viéne les males et il voi un navire qui set aichouer et l déside de voir se que il a lintérieure du navire et il recarde partous et il voi des core et des carte de lile et de sa fores et ou il peuve trouves de coi se nourire a vonlotes
et en pluse il a d coi se protéges du solée et il a une radio et il finise pare apeles et il a u une réponse et un navire arive pour les reprantre mai les anfents ne veule pas partire de lile il dise
que il son bein la et les marin leur done de coi survivre pandent 9 jours mes il survivron pendans
129 jour et le 12 du moi juin en 1889 le navire revin et il leur dones encor plus de nouriteur mes
les enfants ne veule pas tougoure partire de lile .

CHAPITRE 4.
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set doque insi que le mavire repare et il on di que il reviénera que dans 9 an poure leur dones de la nouriture et voila que les anfents son de nouvous seule sure lile et il son bein eureu de vivre sure sete ile et deux des anfents se maite a la rechairche a la déouvérte du trésore dun pirate qui est pairdu sure lile et apres
deux 2h les anfents rentre u cempeman sen rin drouves mes il ne désaipére pas de le trouves se fameus trésore et les anfents ne se bate pas care il sons dans la
maime calére et deux des anfents von chérchesdu bois pour le feux et un il va pour chérches de coi boire et pandent se den la au cempeman il réste que deux
anfents qui fons que le feux ne sétaine pas il préne du bois sure ile et il fons des da de bois poue alimentes le feux et dous les anfents sons réuni pour le dines et
pour discutes de se que il vons faire le lundemin et se soire et les voila parti dormire avec plin de réve dans la téte et le lendemin il pouro golime encore une faire des
fouies lile pour trouves de coi se nourire et en chairchen de la nouriture il fons une découvérte set une crote et il entre dans la crote pour linspétes et la il découvre un grend cofre et il len méne a leur cempeman pour louvrire et la il découvre un goli mago il a des piéres praisieuse et des lingos dor et des bigous et des piéses en ore et en argen .

chapitre 5 .
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ET il déside de partages le butin en 7 et pui il déside de rentres sure la tére fairme
et de revoire leur parens et de leur dire que il ne son plu pouvre mes 3 jours plutare les 7 enfants retourne sur lile care il se sentre trémal quan il ne son pas sur lile care pour eux lile set leur maisons et une seuméne pluta les enfants retourne sur lile avec de la nouritur et de coi se choufes et il continue a
voir se que il a dans lile care il nont pas tous vu sure lile et set la que il se sante le mieu il arive a 4 h de la prémidi et il sapérseves que leur campemens a étes visites mes il ne save pas paqui et il reconstruise leur cempemens mes bein mieu set foi que la premiére fois et avec une toure de carde pour voire ci il a des intru qui viéne dans leur campemens et il ont mi des piége tous au tour de leurs campemans et un sistéme dalarme pour les prévenires camp il dorme la nui pour
me pas se faire avoire dans leurs somaieet camps il ne son pas la et ils on fait un sistéme pour filtres l’eux de maire en eux potable et le lendemin il déside quen 5 enfants comanse a fouiée encore lile pour voire se que il peuve trouves et il trouve
de coi se nourire et un enfants trouve un fore de la 2 gerre mondial et il préviin les autre et les voil la touyses dans le fore et il fouie et il trouve des casque et des jumailes et une radio portable et un drapou de pirate et des piaises du temps des
pirate et il trouve des caises darme et des munisions et une lonque fue et des colier et des piére présieuses que des pirate on oublier il a bein lonten de seula

chapitre 5
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et un trapou du apon qui lui étes de la 2 gerre mondiale care le fore étes une base
de la marine du japon et du temps des pirate il aves des sabres et des pistoles te
des coutaus mes pas de trésore des pirates et donque les deux enfants continue a recardes partou et ils découvre un batau de pirate et les voila qu’il monte sure le navire et les voila dans la cabine du comanden et un des anfents recarde le livre
de bore et il le li et il daicouvre un luieu ou le comanden a probableman caches son trésore et il décide de prendre le livre et le deuxime il continue a recartes le navire et il voi des osemans de pirate et doutre qui son des osemans de solda qui
son more en cobaten les pirates et les voila qu’il cite le navire et il continue a recardes dans le fore pour trouves de coi se nourire et de coi boire et il trouve des barils et il recarde de dans et il voi que les barils son plin de vin et il rempli les courdes de vin et pui il continue la fouie du navire et ils trouve de la poudren et des bales et il ramaine le tou au campeman pour montresn au autres se que il ont ramenes et un joure une male vin saichoues sure la plage et les anfents pouse la male sure lile et il ouvfre la fameuse male et il daicouvre un saisten et une petite boite qui contin une photo dune femme et une maicghe de cheuveu et des costumes dofisies et de comendan et de coi fumes et une petite boite de tabac et une pipe en ivoire et il fons la faite et il na pas de fin care il mon pas dorte a resevoir et sa dure panden 3 joures et dans la male il a ousi des maiticamen mes il ont les fleurres pour faire des maidicamans care sure lile il a des maladies et il a déga 3 mores et il ne réste pus que 5 anfents sure lile et il désite que il noura plus de more mes les angler il dise que il non pas peur d’elle set c’une fille et les filles ne son pas dangereuse et pourten il fou sen maifier

CHAPITRE 6
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ET sure lile il se pase des chouses bein bein bisare et que on ne peu pas aispliques come des aparisions come une femme en blen et pui elle dispares ou un homme noir et on ne set pas qui il son mes sa nen paiche pas de chairches le traisore pairtu du pirate et de dormir et de fair des réves et pui un jour la fameuseb femme en blan réapares et pui elle dispares et les houtres enfants comense a panices mes pas moi care il a tous jour une aisplicasion a tous sa et je di hout soutres que il ne fou pas panices care je trouver le fin de sette istoire il le lendemin la chase au traisore recomense et les goses se maites a la rechairche du traisore et 5 jous il finise par le trouves et il lenmaine au campeman et la il ouvre le cofre et il a dedant des piése d’or et des piéres praisieuses il pui il retourne la ou il ont trouves le cofre et la il trouve un deusiéme cofre et il le raméne ou cempemant il la il ouvre le cofre et la il voie des bares d’or et il conte les bares et il ena 199 bare de 10 kilo et il se dise que il sonts bein riche et il déside de ne pas emparles des deux cofres et de les caches prai du camt et pui un navire arive et set des portuces qui leur aporte de la nouriture et den l’oeù et de coi se faire du feux

CHAPITRE 7
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ET du couries de la famie pour dous les enfants du cent et se jour la il lise le couries et il dise que il continures les rechairches le lendemin le riste du traisore eten atendant les enfants fon du feux et pui il fon de coi se nourire pour le soir et le lendemin et il prandron un petit daigenes et pui il se maitrons a la rechairche du raiste du traisor ai pourtens il on daija 6 cofres au cempement et il on di que il aures un 7 me cofre et les voilas parti a la rechairche du cofre mencan et il se dise que sa leur prendra oumin 9 anée pour le trouves et le soir dombe bein vite sur sette ile et il se dise que il feuron la rechaicha de min a prai leur daijenes et les voilas qu’il se couche de boneur care le lendemin sa se ra une journaie bein dur et les voila sure la trase du dairnies cofre et se la peu prendre des jours et des mois aven que il trouve se cofre et un des enfants di que il foudra partages avec leur pays et un outre lui di que les cofres set tous pour eux et que il ne donera rin pour le pays care il non pas lintension de repartire de lile care leur paren les a ambadones et set poursa que il ne donera rin et que les cofres son pour eux et pas pour leue pays et en plue il on cahes les cofres pou que les adultes ne puise pas les prendre care il save que si les adutes enlaive les cofres il ne pouron rin avoire de se qui dans les cofres care il dise que set eu qui on trouves les cofres et il non pas lintension de partages leur traisore et il se doise que il na ves ca les trouves eu minme mes come il son intérdi de venire sure lile
care lile est que pour les anfents et en lus il on chenges le nont de lile il lon apeles lile des anfents abendoner et le soir arive et les anfents se couche et le lendemin il déside de continuer a chairches pour voire si il nia pas doutre cofre et en chaichen il daicouvre un fore qui date du roi arture et il visite le fore pour voire se que il a dedan et la il daicoufre une cende sale et il a des armures et des fanion
et poui il condinue et il arive dans plusieur chambre et dans une d’elle il aver un cofre et deden il aves des piaire praisieuse et des courone et des piéses de monaieet des vaitemens et il ramaine le dous au cant et de maitre le tous dent
leus cachaites

CHAPITRE 8 .
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Care il on peur que les adultes leur préne les cofres et que il ne poures rin avoire de se que il on découver et pourten les adultes son pas amin sure lile souve pour
amener de la nouriture et pi il doive repartire et se la il a 15 jours et sa fait 39 ans que il son sur lile et les anfents son devenu des adulteb et les filles son de venues des golie femme et les adultes se reprodise et lile comanse a avoire des mouvous
anfents et il on fait sure sete ile un goli simetiére .

FIN

 

 

[Extraits d’images et de textes] – Journal

Prémices

Janvier 2017: […] Je revis les mêmes situations. À croire que c’est une obsession. Je m’entoure de douleurs. Et si elle n’est pas, je la provoque. Elle peut toujours jaillir de quelque part. C’est rassurant.

Journal

16 septembre 2016: J’ai une heure de route devant moi. Je pense qu’elle est nécessaire avant d’arriver au centre D. Prendre l’autoroute me fait voir à quel point notre système est conçu pour la performance et la vitesse. Cette étendue de plat de béton me rappelle aussi combien notre société est profondément glaciale. Elle me fascine et me répugne. Ces routes empruntées par toutes les tranches d’âges ou classes sociales plus ou moins valides ont des directions diversement prédéterminées par ordre d’importance pour l’économie. Certaines routes, de plus en plus petites, s’éloignent pour mener à des endroits de plus en plus secrets, moins importants au regard du monde. Quand on arrive au centre D, endroit étrangement peu connu, on doit s’arrêter brutalement sur le bord d’une nationale limitée à 90km/h. Les passages de voitures ont une fréquence régulière d’en moyenne une voiture par secondes. Il est arrivé une fois qu’un patient s’échappe par la grille laissée involontairement ouverte et se fasse renverser. Il est décédé sur le coup et a servi de leçon aux autres. Aujourd’hui, celles et ceux ayant vécus cette expérience ont du tristement faire la conclusion que le monde en dehors des grilles est dangereux pour eux, La plupart sachant déjà à quel point les asiles psychiatriques étaient mauvais pour eux. Il n’y a de la place dans ce monde que pour les autres.

« Comportement asocial
Violation grave de règles établies.
Fraude, vol et délits divers.
Bagarre, intimidation, destruction des biens d’autrui.
Brutalité et cruauté physique envers des personnes et les animaux

Dépression
Variation de l’appétit, perte ou gain de poids sans raison apparente.
Manque d’intérêt envers des activités autrefois agréables.
Expression de tristesse, de désespoir, d’impuissance, d’incapacité
Fatigue extrême et troubles du sommeil.
Abandonner ses activités sportives ou culturelles
Pessimisme; perception morbide du monde.
Paroles ou pensées suicidaires.

Troubles de la pensée
Incapacité de se concentrer, ou de faire face à des problèmes minimes.
Propos absurdes. Diminution du raisonnement, de la mémoire et du jugement.
Usage de mots étranges ou d’un langage mal structuré.
Réponses à côté parfois incompréehensibles.
Peur et méfiance exagérées.

Troubles des émotions
Hostilité inhabituelle.
Indifférence.
Incapacité de pleurer ou pleurs continuels.
Impossibilité d’exprimer de la joie.
Rire incongru.

Changement de comportement
Hyperactivité ou inactivité, ou passage de l’une à l’autre.
Détérioration de l’hygiène personnelle et négligence de l’apparence.
Commettre des actes dangereux, agir avec imprudence.
Abus de stupéfiants, ou d’alcool.
Négligence en général.
Tentative de fuite par le déplacement physique: déménagements fréquents ou voyages en auto-stop.
Comportement étrange (regard fixe, posture anormale).
Susceptibilité inhabituelle aux bruits, lumières, couleurs ou vêtements.
Changement dans ses habitudes de sommeil et d’alimentation.

Troubles cognitifs et perceptuels
Désorientation dans le temps, l’espace, ou vis-à-vis la personne.
Incapacité de retrouver son chemin dans son environnement habituel.
Impossibilité de résoudre des problèmes courants.
Perte de mémoire relative à des évènements récents.
Incapacité de se laver et de se nourrir, incontinence urinaire et fécale. »

 

septembre 2016: Avant de partir du centre, « madame » m’a offert ce cadeau qu’il m’a demandé d’ouvrir uniquement quand je serai dans ma voiture. Il est très rare que Madame cède à un objet qui lui appartient ou qu’il a trouvé, pour cela j’ai respecté son instruction. En rentrant dans ma voiture, je l’ai déplié pour découvrir ce qu’il m’avait réservé comme mot secret à l’intérieur. Il n’y avait rien. Juste un papier plié, vide, blanc.

Nous sommes ce que nous offrons.

Madame possède plusieurs identités en refusant son identité officielle. Il prend souvent des identités féminines et c’est pour cela qu’on le surnomme Madame. Lorsque les autres osent le nommer de son vrai prénom, il est prêt à tuer.  Il y a beaucoup d’erreurs à ne pas produire avec Madame, celle-là en est une. Ses instabilités identitaires s’exportent sur ses tenues vestimentaires. Il mélange toutes sortes d’habits qui pour lui ont chaque fois une identité bien précise et reconnaissable, comme par exemple une blouse de ménage ou une cravate. Quand il décide de rompre avec une identité ou de la remplacer, il déchire ou casse les habits et es objets associés à cette dernière. En bref, Madame n’a de personnalité qu’à travers les autres. Il a décidé de n’être personne et tout le monde à la fois.

Octobre 2016: Tout est noir autour et à l’intérieur. Ce qu’il reste n’est qu’une trace de l’effacement, l’abandon. Ils sont des trous noirs, créés par ce monde autodestructif. Leur souffrance est infinie. En réalité, c’est la mienne que je photographie. Je me questionne alors sur ce que je photographie. C’est à la fois tout pour moi, rien pour les autres. Le trou noir, c’est moi; pas eux.

Novembre 2016:

 
S., comme les autres, souffre de son enveloppe corporelle. Elle n’en veut pas. Elle n’obéit ni à sa faim ni à ses besoins.
 
S. se rase la tête seule avec des lames de rasoirs et en laisse des cicatrices.
 
S. a une tendance « aléatoire » à vouloir s’enfuir mais sans direction précise. Elle doit être surveillée en permanence.
 
S. a une horloge interne désynchronisée avec le temps. Elle peut dormir à des heures aléatoires.
 
S. ne semble pas éprouver d’attachement à quelconque personne, objet ou lieu.
 
S. me montre par des gestes qu’elle n’aime pas mon appareil photo. Parfois, quand je ne la regarde pas, je sens qu’elle m’observe.
 
S. aime la chaleur. La nuit, elle se colle aux radiateurs. Le jour, elle se met au soleil.
Novembre 2016:

Constats d’observation sur Y.

La douleur est dans le corps.
Les plaies la libèrent.
La seule consolation est dans la mutilation.
La protestation est dans le sang.
Le désespoir a élaboré la patience.
Le corps est un fardeau.

Novembre 2016:

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d’eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !
L’un agace son bec avec un brûle-gueule,
L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

 

10 décembre 2016:

Q . est un des plus jeunes du centre. Il vit dans le monde réel mais il n’adhère pas à lui. Il est impossible de l’approcher de plus d’un mètre que ce soit par l’imposition physique ou par le touché. Il déteste le contact. Il passe son temps à pousser des cris aléatoirement rythmiques qu’il tente d’écouter dans son propre corps en bouchant ses oreilles, ou en créant un écho sonore à l’aide de sa main devant sa bouche. Q. est aussi un des seuls à avoir encore des parents. Je les ai rencontrés, de loin, lors de la fête de Saint-Nicolas, grande fête pour les patients du centre. Ce jour-là j’ai compris que Si Q. perdait ses parents, il perdait tout.

Il a passé toute la soirée dans les bras de sa mère dans un coin de la pièce principale. Son père s’était mis devant eux pour les protéger des autres parfois un peu violents.  Q. lui prenait les mains pour se boucher ses oreilles, comme il le le fait habituellement avec les siennes. Q. ne supporte pas le bruit autre que le sien. Q. était extrêmement calme et doux avec elle. Je les ai longtemps observés.

Sur cette photo, Q (à droite) et sa mère (à gauche) semblent ne faire qu’un. Ils possèdent la même tête, mais les corps sont séparés, le tout dans un cadre étroit. Cette illusion d’optique porte une symbolique forte, mais ne peut malheureusement pas tout dire. S’il y avait une seule photographie que je devais retenir de mon travail, ce serait peut-être celle-là. C’est une capture de Q. dans son état le plus harmonieux et apaisé, chose extrêmement rare dans ce centre étreint de souffrances inguérissables.

3 janvier 2017:

Ce quatrième mur qui nous protège est une prison pour eux. Il y a la force de celui qui regarde et de celui qui montre. En dehors des mots, il y a les gestes. Les gestes sont forts quand ils sont donnés. Je suis donné à ce monde, et ce monde se donne à moi. Il faut pouvoir le recevoir tel qu’il est. La photographie nous plonge dans le monde réel, mais nous bloque à lui par son fait même. Je suis témoin de la réalité qu’à travers mes blessures. Mes blessures se rendent visible que grâce à la réalité. Sans le prétexte du réel, je ne suis plus rien. Juste une agonie, de plus.

 

2016